Jusqu’ici, les enceintes sportives, aussi modernes soient-elles, n’avaient pas su répondre aux besoins des personnes atteintes de troubles du spectre de l’autisme (TSA). Trop de bruit, trop de monde, trop de stimuli. Comme le résume Alixia Gaidoz, responsable RSE à la FFR : « Aujourd’hui, on n’avait pas de solutions pour les handicaps cognitifs. » Ce « aujourd’hui » dit tout. Car il y a un avant — fait d’exclusion implicite — et un après : celui que cette initiative vient d’ouvrir.
Face à ce constat, la FFR a voulu agir. Et pour la première fois dans un stade aussi emblématique, une solution a vu le jour. Un espace à part, pensé pour réconcilier expérience sportive et sensibilité cognitive.
Une loge transformée en havre sensoriel
La Sensory Room, ce n’est pas juste une pièce isolée. C’est un espace entièrement repensé : éclairage tamisé, sons adoucis, jeux et objets sensoriels. Tout y est conçu pour apaiser, rassurer, accompagner.
Des tubes lumineux à manipuler, des balles lestées à presser, ou encore des murs tactiles aux textures variées : tout est pensé pour canaliser l’attention et réduire l’anxiété.
Un travail de fond mené main dans la main avec Autistes Sans Frontières, dont l’expertise a permis de créer un environnement parfaitement adapté aux besoins spécifiques des enfants autistes. Anne-Sophie Peyle, membre de l’association, le dit simplement : « Les enfants ont pu en profiter pleinement, et les parents sont ravis. Ils peuvent enfin emmener leurs enfants sans craindre de déranger. »
La FFR et Apicil, pionniers de l’inclusion cognitive
Ensemble, la Fédération Française de Rugby et le groupe Apicil ont relevé un défi que peu d’acteurs du sport ont encore osé aborder : l’accessibilité pour les handicaps invisibles.
Là où les dispositifs pour les personnes à mobilité réduite sont devenus plus fréquents, les troubles cognitifs restaient dans l’ombre. Ce partenariat change la donne.
Philippe Hassel, directeur de la communication du groupe Apicil, insiste sur cette vision : « L’idée d’installer une Sensory Room s’est imposée naturellement. Notre objectif commun, avec la FFR, c’est de rendre le rugby accessible au plus grand nombre. »
La preuve par les regards
Ce soir-là, ils étaient là. Ces enfants que le bruit des stades éloignait. Ces parents qui, souvent, renonçaient. Grâce à cet espace, ils ont pu vivre le match ensemble. Rires, émerveillement, émotions… Les visages en disaient long. Pour Alixia Gaidoz, le constat est clair : « Quand on voit le regard et le sourire des enfants, celui des parents, on se dit qu’on a fait le bon choix. »
Ce coup d’essai n’était qu’un début. La FFR et Apicil l’assument : leur ambition est de dupliquer cette initiative dans d’autres stades, d’autres compétitions. « Ce sont des lieux encore trop rares en France », note Philippe Hassel. Le message est clair : cette première n’est pas une exception, mais un modèle.
À l’heure où l’inclusion devient un enjeu central, cette Sensory Room marque un tournant. Elle illustre la capacité du sport à se réinventer pour n’exclure personne. Elle dit, en creux, que l’innovation sociale a toute sa place dans les tribunes comme sur le terrain.
Le rugby français, en pionnier, pose ici une première pierre. Une pierre douce, sensible… et pleine d’espoir. Et si cette loge tamisée du Stade de France devenait la première brique d’un sport vraiment universel, où chaque voix, chaque silence, a enfin sa place ?