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LFP-DAZN, fin de partie ? La Ligue 1 coincée dans un bras de fer sans issue


En 2024, le contrat entre la LFP et DAZN avait tout d’un accord structurant. Pour 400 millions d’euros par an, DAZN obtenait la diffusion de huit matchs sur neuf par journée de Ligue 1, jusqu’en 2029. L’enjeu était clair : assurer une nouvelle stabilité financière au championnat, tout en le rendant plus attractif à l’international grâce à une plateforme 100 % digitale.

Mais dès la première saison, la réalité a rattrapé les ambitions. DAZN, confronté à des pertes colossales estimées entre 200 et 250 millions d’euros sur l’exercice 2024-2025, a dénoncé des manquements de la LFP : lutte insuffisante contre le piratage, manque de coopération éditoriale des clubs, et difficulté à monétiser le produit.

DAZN contre-attaque : 573 millions en jeu

La LFP a tenté de reprendre la main en proposant une sortie anticipée du contrat. Lors d’un conseil d’administration, elle a suggéré une indemnité comprise entre 110 et 125 millions d’euros pour rompre l’accord dès la fin de la saison 2024-2025. Mais DAZN a refusé ces conditions, les jugeant inacceptables. Selon L’Équipe, la plateforme a déjà versé 35 millions d’euros en janvier, mais doit encore honorer deux échéances cruciales d’un montant total de 140 millions d’euros d’ici à juin.

En parallèle, DAZN a lancé une offensive judiciaire, réclamant 573 millions d’euros à la LFP pour “tromperie” et “manquements contractuels”, rendant tout compromis très incertain.

Sous l’égide du tribunal de commerce de Paris, une médiation avait été initiée début mars. Objectif : trouver une sortie digne pour les deux camps. Mais là encore, échec. DAZN a maintenu sa ligne : pas question de céder aux exigences financières de la LFP.

Dans un communiqué publié à la mi-avril, la Ligue a réagi fermement :

« LFP MEDIA prend acte de l’échec de la médiation initiée début mars 2025. Le contrat liant les parties demeure en vigueur, et LFP MEDIA attend de son partenaire qu’il exécute pleinement l’ensemble de ses obligations à ce titre » (source : communiqué LFP, 15 avril 2025).

Que se passe-t-il si DAZN ne paie pas ?

Le contrat entre la LFP et DAZN stipule que la plateforme doit verser 140 millions d’euros en deux échéances, prévues les 30 avril et 30 juin 2025. En cas de non-paiement, la LFP dispose de plusieurs recours juridiques :

  • Saisie de la garantie bancaire : la LFP peut demander la saisie de la garantie fournie par l’actionnaire de DAZN pour obtenir les sommes dues.
  • Action en référé : la LFP peut engager une procédure d’urgence devant le tribunal pour contraindre DAZN à honorer ses engagements financiers.
  • Utilisation des fonds de réserve : en attendant l’issue des procédures, la LFP pourrait puiser dans ses réserves pour assurer les paiements aux clubs, comme cela a été le cas lors de précédents retards de paiement.

Ces mesures visent à protéger la stabilité financière des clubs de Ligue 1, fortement dépendants des droits TV.

Après Mediapro, l’échec DAZN : deux fiascos en quatre ans

En 2020, la LFP avait déjà vécu une désillusion majeure avec Mediapro, détenteur des droits pour plus de 800 millions d’euros par an. Le groupe sino-espagnol avait quitté le navire quelques mois après le début de la saison, laissant un trou béant dans les finances des clubs.
(source : L’Équipe, 12 décembre 2020 – “La LFP et Mediapro mettent un terme à leur contrat”)

L’épisode DAZN, bien que moins spectaculaire, prolonge ce cycle d’instabilité et confirme la difficulté du football français à s’inscrire dans un modèle économique durable.

Qui pour sauver la Ligue 1 ?

Cette impasse fragilise directement les clubs de Ligue 1, dont les budgets dépendent en grande partie des recettes télévisuelles. À moins de trois mois du coup d’envoi de la saison 2025-2026, l’avenir de la diffusion reste flou. Et les options en plan B ne sont pas nombreuses.

Canal+, beIN Sports, Amazon Prime Video… tous ces noms reviennent avec insistance (source : Sport Business, 15 avril 2025). Mais les offres potentiellement formulées sont bien en-deçà des 400 millions d’euros annuels convenus avec DAZN.

Vers un nouveau modèle de diffusion ?

Pour certains dirigeants comme Joseph Oughourlian (RC Lens), l’échec DAZN doit être l’occasion de réfléchir à un nouveau modèle. Une centralisation de la diffusion sur une seule plateforme est évoquée pour accroître l’attractivité. L’idée d’une chaîne 100 % Ligue 1 refait aussi surface, bien que son financement et sa faisabilité restent flous.

L’impasse actuelle ne fait que souligner les failles structurelles du football français, encore trop dépendant des droits TV. À la crise économique s’ajoute une crise de confiance. Les clubs attendent des garanties, les diffuseurs potentiels hésitent, et les supporters risquent une fragmentation de l’offre.

Les mois à venir seront cruciaux. Pour la LFP, la page DAZN est peut-être toujours en cours. Mais le vrai défi sera de trouver qui acceptera d’écrire le prochain chapitre — et à quel prix.

Sources : L’Equipe, RMC Sport, Sport Business.



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